L’année 2019 se termine tristement avec la disparition de Fernande Saint-Martin, théoricienne de l’art et sémiologue de renommée internationale, ancienne directrice du Musée d’art Contemporain de Montréal (1972-1977) et directrice en chef de la revue Châtelaine (1960-1972). Entre autres rôles prestigieux, elle nous laisse en legs La Sémiologie du langage visuel (1987), La théorie de la Gestalt et l’art visuel (1990) Le sens du langage visuel (2007) et L’immersion dans l’art (2010), traduits en plusieurs langues. Ses travaux de sémiologie lui valent, en 1989, le prix Molson. Critique d’art et de poésie, elle signe une anthologie de ses poèmes de 1953-1975, La fiction du réel (1991), ainsi que le livre Marouflée la langue : dessins et poèmes (1998).
Sa carrière a été ponctuée par plusieurs honneurs : Membre de l’Académie des lettres du Québec dès 1974, Membre de la Société royale du Canada, depuis 1982, Officier de l’Ordre du Canada en 1988, année où elle reçoit le Prix André-Laurendeau, puis le Prix Molson en 1989.
J’ai eu le plaisir de lui consacrer une entrevue qui a été publiée dans ETC Montréal en 2008, que l’on peut retrouver sur Érudit à cette adresse : https://www.erudit.org/fr/revues/etc/2008-n83-etc1135168/34754ac.pdf, où elle raconte son parcours de militante féministe avant l’heure, avec ses embuches et ses espoirs.
J’ai eu aussi le privilège et l’honneur d’avoir été choisi par elle pour représenter son coup de cœur pour le 40e anniversaire de Vie des Arts (printemps 1996), où elle me dédiait ce poème inédit inspiré par une de mes œuvres :
Au bord de l’œil
ni couroucée
ni triangulée
l’aube se nidifie
des fils abrupts
du respir
chahutante berceuse
creusée au cou
à vivre le chainon
sussurant la fin du frimas
jambes vertes
nouées aux portes de l’eau
fuseau étincelant
de la nuit torride
jonque amarrée au cyprés
disposée à tourner
pour corruguer la cible
qu’on plaque aux yeux
virevolter les masques
coulés au creux des cris
jambes filées à la rive
ondulante
gerbes d’anémones
gelant le puissant silence
d’oser tourner
d’oser enlacer
le centre de l’été
qu’à sa manière
la chute a secrété au bord de l’œil
sidéré
Reposez en paix, chère Fernande, vous qui avez marqué le Québec en révolutionnant la pratique journalistique, la sémiologie visuelle dans le monde et la vie des femmes en contribuant à leur émancipation dans la société par votre audace, votre passion et votre grande sensibilité.
Depuis plusieurs années les graffeurs utilisent des dispositifs numériques en multipliant et hybridant les techniques tels que le graff virtuel, le light painting, le laser tag, le led throwie, l’audio graffiti, le water wall, etc. ainsi qu’on peut en voir quelques exemples dans le diaporama de ce numéro et en accompagnement du texte de Sémia Youssfi qui analyse ces approches diversifiées de l’art urbain.
Dans un processus opposé, l’artiste Véronique Savard utilise les effets de la cybersphère numérique dans une démarche picturale que Teva Flaman et Pierre-Luc Verville étudient à partir du concept de médiologie.
Autour des questions sur la formation de l’acteur et des processus de création à l’ère du numérique que soulève l’ensemble des textes intitulé Actor Training and Creation Process in the Digital Era, se termine le dossier L’acteur face aux écrans, Bodies on Stage : The Actor Confronted with Screens, avec les contributions de Andy Lavender, Maria Kapsali, Hilary Halba et Stuart Young, Gwenyth Dobie, William J. Mackwood, Don Sinclair et Kurt Vanhoutte.
Faisant suite au dossier Cybercorporéités et subjectivités Francisca Morand expose et analyse le projet Emovere et Louis Jacob recense le collectif Par le prisme des sens : médiation et nouvelles réalités du corps dans les arts performatifs dirigé par Isabelle Choinière.
Norbert Hilaire nous fait découvrir son dernier livre, La réparation dans l’art, publié aux Éditions Scala, ouvrage d’une grande importance, dont on peut voir l’annonce dans la colonne de droite.
Recevez chers lecteurs nos souhaits tout en lumière pour 2020.

GRAFFITIS NUMÉRIQUES

Le numérique comme médium artistique et communicationnel en art urbain.
De nos jours, à travers l’évolution numérique et l’apparition des nouvelles technologies, le graffiti connaît une évolution considérable aussi bien au niveau de la production qu’à celui de la communication. Concernant la production, le graffiti se présente actuellement avec de nouvelles techniques d’écriture et d’exposition numérique (le graff virtuel, le light painting, le laser tag, le led throwie, l’audio graffiti, etc.). Lire plus…
Hors Dossier

La remédiation du cyberespace dans la peinture de Véronique Savard
Véronique Savard explore les effets de sens du numérique en faisant passer différentes textualités de la surface des écrans à l’espace pictural. Cet article analyse les enjeuxartistiques du dialogue médiologique initié dans ces passages, symptomatiques de modes d’existence propres à notre époque. En produisant ce qu’elle appelle des « tableaux-écrans », l’artiste traduitl’esthétique de la « cybersphère ». Nous proposons aussi que les œuvres de Savard ouvrent la voie à un « art médiologique»,questionnant les relations interpersonnelles à l’ère d’Internet par des remédiations productrices d’aura.
Veronique Savard explores the effects of sense in the digital realm by organizing translations oftextualities from the surfaces of screens to the surface of paintings. This article aims to analyze what is artistically at stake in the intermedial dialogue ignited in those passingsthat are indicative of states of existence proper toour time. By producing “screen paintings”, the artist converts in physical matter of a canvas the aesthetics of the “cybersphere”. We suggest to the reader that Savard’s artworks lead the way to what we call an “intermedial art”, questioning interpersonal relationships in a computer-based era by creating remediations that can produce the experience of the aura.
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L’acteur face aux écrans Bodies on Stage : The Actor Confronted with Screens

Intermedial Acting for Hybrid Performance Environments
This paper considers specific techniques that actors apply in performing simultaneously to camera and to co-present (theatrical) spectators. The sorts of work (technique, skill) required of actors by medium-specific formats such as dramatic theatre, television series or film narratives are broadly familiar. There is far less certainty concerning techniques appropriate to hybrid (actual/virtual, 2D/3D, co-present/distributed) performance environments. Typically, these entail modes of performance that play out across different spaces simultaneously, address audiences synchronously through diverse media, and involve interaction with other performers/participants who may be both present and remote. Lire plus…

Switch On! Using Mobile Phones in Actor Training
Drawing on scholarship on multimedia performance as well as psychophysical actor training, this paper will present a research project undertaken in November 2014, which explored the use of mobile phones both as cameras for the development of a live-feed (“kinaesthediting”) application and as tools that produce quadrophonic sound in response to the actor’s movement. Lire plus…

Embodied Technology in a Specific Verbatim Theater Practice
Increasingly, computerized technology – in the form of iPods, mobile phones and smart watches – has become an extension, even part, of the human body, and in the process has modified and perhaps even determined human behavior. Over the last six years we have developed a form of “verbatim theatre,” whose use of such audio technology governs the actor and her performance onstage, thereby challenging fundamental assumptions of the actor’s craft. Lire plus…

Animating the Process: Emerging Interactive Modalities
Understanding theatre as an inherently technological medium or hyper-medium with innate capabilities to incorporate and engage in dialogue with media components, broadly conceived, (Balme) reframes an investigation of interactive digital media in live performance to focus on dramaturgical methodologies that integrate, in particular actors, early in the development process. Coupling this paradigm of intermedial theatre with Hayles’s notion of technogenesis, that as humans, we are defined by our co-evolution with technologies, the actor becomes an animator-performer who co-creates with technology. The challenge is how best to develop and facilitate this dialogue within the development of works that integrate emerging interactive modalities. Lire plus…

Lucid Dreamers: Immersive re-enactment in the work of CREW
This paper focuses on a workshop on immersive performance that ran from January 7th until January 27th 2013 at the Curtis R. Priem Experimental Media and Performing Arts Center (EMPAC) in New York. The workshop was conducted by Eric Joris and his company, CREW. Since 1998, the immersive live art of this Brussels-based performance group has successfully challenged common notions of acting, (tele)presence, spectatorship, theatricality and narration. Scientific reflection has always played a role in CREW’s creative process, and engineers from different universities have developed new technologies for CREW to use on stage. The developers, for their part, reciprocally found in CREW’s experimental theatre a laboratory for testing the progress and feasibility of their interface designs. Lire plus…
Cybercorporéités et subjectivités

Par le prisme des sens : médiation et nouvelles réalités du corps dans les arts performatifs.
Technologies, cognition et méthodologies émergentes de recherche-création (et autres critiques)
« Par le prisme des sens est un ouvrage provoquant, inspirant, qui met en cause le lexique et les modes de raisonnement traditionnels. Les auteurs principaux Choinière, Pitozzi et Davidson ont chacun une voix qui leur est propre ; en plus d’une substantielle introduction, ils signent les trois premiers chapitres. L’édition française de l’ouvrage est augmentée de sept chapitres de Erin Manning, Louis-Claude Paquin, Joanne Lalonde, David Howes, Elizabeth Johnson et Luc Vanier, Anne-Laure Fortin Tournès, et Anaïs Guilet qui explorent divers autres aspects du tournant performatif en recherche, de la théorie de la connaissance incarnée, de l’engagement intersubjectif et des plateformes interactives, de la construction de l’expérience sensorielle immersive, du corps étendus aux nouvelles technologies, du corps en environnement numérique, du corps-écran.

In the intersection of emotion, biosensors and sound:
emerging corporealities in Emovere’s interaction
This article aims to reveal how corporeality emerges from the meeting of the body with technologies, specifically in the context of the creative process for the interactive dance and sound piece Emovere (2015). Emovere’s creation process focused on configuring artistic material by exploring the biology of emotion, through experimenting with induction of emotional states based on corporeal patterns, using the Alba Emoting method, developed by the chilean psychologist Susana Bloch. At the same time the project involved experimentation with physiological sensors to modulate a sound environment by the dancers, creating an iterative process between embodied listening, sound composition and dance movement. A series of perceptive, sensory and affective practices had to be carried out in order to integrate the materials suggested by the experience with the emotional induction and the interactive and sound environment, arousing the emergence of new patterns of movement rooted on this new corporeal configuration. Lire plus…